Bernard-Henri Lévy et deux combattants syriens - REUTERS/JEAN-PAUL PELISSIER
Entouré de six acteurs de la révolution libyenne et de cinq militants syriens, Bernard-Henri Lévy a donné une conférence de presse, vendredi 25 mai, à Cannes. Deux des militants syriens, le visage masqué par le drapeau de leur pays et des lunettes noires, ont été présentés comme "des combattants qui ont quitté clandestinement la Syrie il y a quelques heures pour découvrir avec nous Le Serment de Tobrouk".
Contrairement à l'usage qui veut qu'un cinéaste rencontre la presse après la projection de son film, le réalisateur du Serment de Tobrouk s'est exprimé avant que l'on puisse voir ce documentaire, tourné pendant le soulèvement contre Khadafi. Thierry Frémaux, délégué général du Festival, a expliqué ainsi cette entorse à la règle : "Nous voulions que la conférence porte sur ce dont parle le film plutôt que sur le film lui-même".
Bernard-Henri Lévy et l'équipe du film "Le Serment de Tobrouk" - REUTERS/JEAN-PAUL PELISSIER
De fait, les journalistes présents, moins nombreux que ceux qui se pressaient le matin pour interroger Robert Pattinson, l'acteur principal duCosmopolis, de David Cronenberg, ont posé des questions politiques plus que cinématographiques. La plupart d'entre elles ont été éludées, comme cette interrogation d'un journaliste israélien qui a demandé aux membres de la délégation libyenne si leur pays comptait rétablir des relations diplomatiques avec l’État d'Israël.
Moustapha El-Zagizli, que Bernard Henri-Lévy a présenté comme "le prince deschabab", aujourd'hui chargé du désarmement des milices, a raconté sa rencontre avec "mister Bernard", aux tout premiers jours du soulèvement, à Benghazi. Le philosophe a expliqué que les militants syriens représentaient, dans la salle des conférences de presse, "les dédicataires de ce film". Pour son coréalisateur (avec Marc Roussel), Le Serment de Tobrouk "montre ce qui doit être fait en Syrie", une intervention militaire internationale "qui n'était pas plus facile à Benghazi qu'elle ne le serait à Homs".
Thomas Sotinel
Vendredi 25 mai 2012, 19h35
Pour symboliser "le passage du flambeau de la Liberté" entre ex-rebelles libyens et insurgés syriens en guerre, Bernard-Henri Lévy est venu accompagné, vendredi à Cannes, par des vétérans libyens et deux opposants clandestins au régime de Damas.
L'écrivain-philosophe avait prévu et annoncé que des invités libyens, rencontrés l'an dernier pendant les combats, fouleraient à ses côtés le tapis rouge pour la projection de son documentaire présenté en sélection officielle (séance spéciale), "Le serment de Tobrouk".
Outre ces ex-rebelles, aujourd'hui membres de la nouvelle élite libyenne, deux Syriens sont clandestinement sortis de leur pays, via des pays limitrophes pour monter les marches vendredi soir aux côtés de l'équipe du film.
Par crainte de représailles contre leurs familles, ils ont demandé à conserver l'anonymat et sont apparus masqués vendredi en conférence de presse à Cannes, visage et tête dissimulés sous d'épaisses lunettes noires et des drapeaux de la "Syrie libre".
"Ils étaient en Syrie il y a encore quelques heures, ils sont sortis clandestinement (...) et ont pris des risques insensés pour être avec nous ce soir", a déclaré BHL.
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Le philosophe Bernard-Henri Levy attend l'arrivée du président français Nicolas Sarkozy le 15 septembre à Tripoli. (Photo Eric Feferberg/AFP/Archives)
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L'écrivain a appelé les spectateurs à regarder "Le serment de Tobrouk", "documentaire personnel, donc subjectif" comme "un film de cinéma doit l'être". "Mais je vous demande aussi de le voir avec un regard à double foyer: le regard d'une guerre gagnée et le regard d'une tragédie en cours", a-t-il ajouté.
Jeudi après-midi, c'est derrière les rideaux tirés d'un bureau parisien, au rez-de-chaussée d'un immeuble d'un quartier chic, que Libyens et Syriens avaient fait connaissance, en présence d'un reporter de l'AFP.
En arabe, Suliman Fortia, l'un des héros du bastion rebelle libyen de Misrata, a expliqué aux deux Syriens que "Bernard-Henri Levy a été le premier à être venu en Libye. Ce qui s'est passé l'a été grâce à lui, car il connaissait Sarkozy".
"Je vous souhaite la même chose. Bachar est un tyran comme Assad, il faut le faire tomber... Ma famille a lutté pendant trente-six ans, il faut avoir du courage".
En anglais, langue que certains d'entre eux comprennent, BHL a lancé: "Aux Jeux Olympiques, il y a quelque chose qui s'appelle le passage du flambeau. J'aimerais que demain, à Cannes, vous passiez le flambeau de ce que vous avez fait à nos amis syriens. C'est le sens de notre rencontre. Vous avez la flamme de la liberté, vous la passerez à nos frères syriens".
L'un des deux Syriens, désormais officier dans l'un des groupes rebelles, ému aux larmes, est alors sorti de la pièce. Avant de revenir pour que, sur un écran de télévision, tout le monde visionne le "Serment de Tobrouk".