venerdì 18 maggio 2012

Dr Riadh Ben Slama : « Le projet de la médecine zeitounienne est amusant et insensé »

Vendredi 18 Mai 2012

Sante-tn

La tension paraît à son comble entre la Zitouna et le Conseil de l’ordre des médecins concernant la prétention de l’enseignement zeitounien de prodiguer des études médicales.
En effet, lors de sa présentation le jour de la réouverture de la Zitouna, le 6 mai 2012, Cheikh Houcine Laâbidi, a annoncé l’éventualité d’enseigner la médecine à la mosquée Zitouna, afin «d’avoir des médecins zeitouniens de cœur qui ont le diplôme de la Zitouna et la médecine, avec la morale et l’éthique». « Qu’ils enseignent leur médecine et nous enseignerons la nôtre», a-t-il ajouté en substance.
Suite à ces propos, le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) a publié un communiqué, en se basant sur les propos du Cheikh Laâbidi cités dans l’article «Qui contrôle la Zitouna ?», paru dans le quotidien La Presse du 8 mai.
Le dit communiqué «fait état du redémarrage de l’enseignement zeitounien, ce à quoi chacun ne peut qu’applaudir, quand on sait ce que cet enseignement et ses maîtres ont apporté à la société tunisienne, et ailleurs, en matière d’affermissement de la foi et de la culture musulmanes».

Cependant, et selon cet article, l’enseignement zeitounien s’écarterait de sa vocation initiale pour devenir multidisciplinaire et ce, en dehors de tout cadre juridique, de toute tutelle et des plus élémentaires conditions de crédibilité.
Face à ces propos «portant atteinte à la corporation», le CNOM «s’est déclaré profondément préoccupé par de telles dérives et de telles assertions et attend des autorités concernées de l’Etat la mise au point qui s’impose».

Pour en savoir plus sur cette polémique et sur son éventuelle évolution, Sante-tn a contacté Dr Riadh Ben Slama, portant la triple casquette de professeur agrégé en médecine, de secrétaire général du Conseil régional de Tunis de l’Ordre des médecins et de président du Collège national d’urologie. Il a bien voulu répondre à nos questions. Interview expresse …




Comment estimez-vous, en votre qualité de médecin et en celle de responsable de structures médicales, cette proposition-décision d’enseigner la médecine à la Zitouna ?
J’aimerais d’abord condamner les propos tenus récemment par les nouveaux responsables de « La Zitouna » et notamment celles d’un certain Houcine Laâbidi. Ce monsieur laissant entendre, que notre médecine est devenue sans morale ni éthique, et qu’il convenait de « moraliser la médecine » en offrant une « formation de médecins à la fois compétents et pieux qui craignent Dieu ».
Ensuite, ses propositions d’enseigner une « certaine » médecine « non occidentale » dénotent d’une totale méconnaissance de l’enseignement médical ; puisqu’il va jusqu’à déclarer « qu’ils enseignent leur médecine et nous enseignerons la nôtre». Franchement, il serait alors intéressant de savoir quelle est sa médecine qu’il veut enseigner ? Je pense que ceci est tout simplement un rejet de la science et de la modernité. Car il n’ya qu’une seule médecine aujourd’hui et c’est celle qui est basée sur les connaissances scientifiques.
J’estime enfin que l’enseignement de la médecine, est devenu actuellement une activité tellement complexe avec des exigences pédagogiques et une masse d’informations telles, qu’elle ne peut pas être dispensée par n’importe qui et n’importe où. En résumé, je dirai que ce projet « amusant» d’enseigner la médecine est tout simplement insensé !

Comment comptez-vous combattre cette nouvelle tentative de noyauter la médecine moderne et rationnelle ?
Il faut rappeler que « La Zitouna » fait partie de notre patrimoine commun, tunisien voir arabo-musulman, elle appartient à notre mémoire collective et personne n’a le droit de venir aujourd’hui utiliser cette institution, qui renaît de ses cendres, pour porter atteinte à nos acquis.
La médecine tunisienne, étant un de nos acquis les plus précieux, elle est le fruit des efforts de plusieurs générations de médecins, de cadres paramédicaux et même d’administratifs, qui ont construit patiemment, depuis 50 ans , au prix de souffrances et d’abnégation, cette médecine dont on est fier aujourd’hui et dont beaucoup de peuples voisins, et malgré des moyens qui nous dépassent, en sont dépourvus. Je dis cela pour demander que ce bien commun soit défendu et préservé par tous, et en premier, par nous professionnels de la santé.
On peut vous affirmer déjà, et en supposant que ce projet insensé puisse aboutir, que le Conseil de l’ordre des médecins, qui organise la profession, ne reconnaîtra jamais ce genre de diplômes et ne délivrera jamais le droit d’exercer la médecine aux personnes qui auront suivi ces cursus hors normes.
Nous demandons, également aux autorités, de prendre leurs responsabilités, et de réagir de façon claire, nous interpellons notamment les médecins qui sont actuellement dans le pouvoir, ils ont une responsabilité historique de protéger notre médecine de ces dérives. De toutes les manières il faudrait une réaction commune de la part de tous les organismes professionnels (ordre, syndicats, universités…) pour s’opposer à ce « projet ».

Croyez-vous que légalement, la nouvelle Ecole de la Zitouna puisse imposer son approche ? Surtout si la coalition actuelle est confirmée au pouvoir après les prochaines élections définitives ?
J’ai l’espoir qu’une majorité de Tunisiens, soucieuse de préserver ses acquis de modernité et de développement, dont la médecine, garante de sa santé et de celle de ses enfants, saura refuser et empêcher une telle dérive, à condition que nous, professionnels de la santé, fassions l’effort nécessaire pour réagir, informer et expliquer à l’opinion publique la gravité de ce projet, encore une fois insensé et rétrograde.


Propos recueillis par
Mounir Ben Hédi










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