Le 4 août prochain se tiendra le troisième volet du procès en appel opposant l’Agence Tunisienne de l’Internet au trio d’avocats de la censure des sites à caractère pornographique qui prétextent la « protection de l’enfance » selon des « valeurs arabo-musulmanes ».
Depuis le début de cette affaire, on s’interroge sur les justifications de cette action, sachant que juridiquement aucune loi ne régit le domaine de l’internet dans ce pays.
De même, le pacte international, relatif aux droits civils et politiques, signé par la Tunisie, ne définit pas Internet, mais plutôt donne son interprétation selon laquelle la liberté de chaque individu à accéder à l’information est un droit.
Le rapport présenté par les plaignants et sur lequel s’est basé le juge pour ordonner à l’Agence Tunisienne de l’Internet de censurer les dits sites, ne prend pas en considération la période « avant 14 janvier », pendant laquelle les internautes utilisaient des proxys pour contourner la censure d’Ammar404, en faussant l’origine du trafic internet.
Ces pseudo-protecteurs de l’enfance tunisienne voudraient voir la justice se substituer aux parents, pour les protéger d’un danger du web, mais qu’en est-il de la protection des enfants du danger des chaines TV qui diffusent le même type de contenu, ou encore les magazines, les vidéos échangées sur les téléphones mobiles etc. Est-ce le nouveau rôle de la justice dans cette démocratie en pleine construction ?
Sami Ben Romdhane, père de 3 enfants, internaute et professionnel du web, s’insurge quant à cette question rapporte un magazine (malissonline.com), « En ce moment je ne peux qu’avouer que les défenseurs de la censure sont des hypocrites et je vais le prouver. On s’en prend aux sites internet qui ne sont qu’une projection de la société. Le contenu qu’il soit porno, violent ou immoral on le voit sur les chaines télés, on l’entend et on le voit dans nos rues, écoles, lycées et universités. Pourquoi, c’est l’internet qu’on vise, c’est juste de l’hypocrisie. Moi pour mes enfants, ce qui me fait plus peur c’est les conducteurs qui grillent les feux rouges, qui conduisent en état d’ébriété, c’est le manqué de sécurité dans les rues, les transports en commun et autres endroits publics, mais pas internet et puis j’aimerais bien que l’argent du contribuable soit dépensé à pallier ces problèmes quotidiens, et non à censurer un site internet que je peux effectuer si j’ai envie car je suis responsable de mes enfants ».
Pour en revenir à cette question d’argent du contribuable et selon un rapport d’experts publié récemment (nawaat.org), l’application d’une décision en faveur des plaignants obligerait l’Etat à débourser pas moins de 16 millions de dinars par an ! Une somme indécente pour des ciseaux virtuels, alors que nous savons que tous les fournisseurs internet en Tunisie offrent l’alternative de contrôle parental pour protéger les enfants. Donc un coût annuel, qui serait mieux alloué au développement du moyen qui a véhiculé et exporté toute une révolution : Internet. Un des objectifs qu’avait spécifié le PDG de l’ATI à maintes reprises dans ses déclarations.
Aujourd’hui Internet est bel et bien dans la ligne de mire de certains, pour des raisons non évidentes mais Ammar404 pourrait reprendre ses ciseaux pour un round… Est-ce Internet qui dérange ou bien cette liberté retrouvée par un peuple longtemps muselé ?…Le porno aujourd’hui, le cinéma d’ici peu, et après … que décidera de nous cisailler cette justice avec notre propre argent ? Quand est ce qu’on comprendra que c’est le peuple qui décide de ses choix, non pas le paternalisme de l’Etat et de ses institutions ?
Et comme disait Potter Stewart : « La censure reflète le manque d'une société à avoir confiance en soi. »
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Fonte: Slim Azzabi Tunis-Hebdo
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