domenica 4 settembre 2011

Que vont faire les humanitaires en Libye?


Depuis la chute du régime de Kadhafi, l'aide commence à arriver en Libye.
L'après-Kadhafi est déjà en marche. La "Conférence des Amis de la Libye" qui a rassemblé 60 pays à Paris le jeudi 1er septembre l'illustre bien. Dans le discours de clôture, le président français Nicolas Sarkozy a appelé à la réconciliation du peuple libyen et a annoncé le dégel immédiat de 15 milliards de dollars d'avoirs libyens sur les 50 placés à l'étranger.
Avant même la fin des combats, les agences de l'ONU et certaines ONG interviennent pour panser les plaies libyennes. Au risque d'accréditer les soupçons de collusion entre militaires et humanitaires. En mars dernier, pour justifier son intervention, l'OTAN s'était appuyée sur la résolution 1973 de l'ONU, qui autorisait les Etats membres à utiliser toutes les solutions possibles pour venir en aide à la population civile, à l'exception d'un débarquement terrestre. C'est à cette occasion que l'expression "guerre humanitaire" est réapparue.
"C’est une expression qui n’a pas de sens, note Jérôme Larché, chercheur associé à la Fondation pour la Recherche StratégiqueOn ne fait pas une guerre à but humanitaire, on fait une guerre avec un but politiqueIl faut absolument séparer la guerre des humanitaires. Cela pourrait brouiller l’image des ONG: elles doivent rester éloignées le plus possible de la politique".
Dans quel cadre alors s'inscrirait une action humanitaire? En Libye, point de catastrophe naturelle ou de famine, à la différence d'autres pays. La situation dans la Corne de l'Afrique, où des milliers de personnes sont en danger de mort, ne peut en effet être résolue par les pays eux-mêmes. D'où le rôle prépondérant des ONG. Même chose avecle tremblement de terre qui a frappé Haïti en 2010. Les dégats, colossaux, exigeaient la présence d'une aide extérieure pour remettre le pays en état.
"Il est clair que la situation en Libye ne nécessite pas un déferlement humanitaire, décrypte Antoine Peigney, directeur des relations et opérations internationales de la Croix-Rouge françaiseLa Croix-Rouge est intervenue à Misrata, mais s’est ensuite retirée du pays, car nous n'avions pas de mandat pour y rester. Il n’y a pas de programme prévu dans l’immédiat."
La donne est différente pour le Comité International de la Croix-Rouge(CICR), présent sur le terrain depuis le mois de mars. Son mandat, très spécifique, prévoit qu'il assure la protection et l'assistance des victimes dans les zones de conflits.
Tripoli en danger
La capitale libyenne, Tripoli, fait actuellement face à un manque d’eau potable. En cause, les multiples coupures de courant et la pénurie de pétrole (les raffineries sont fermées) qui empêchent le traitement de l'eau. L’UNICEF a déjà distribué 23.000 bouteilles d’eau et planifie l'envoi de 5 millions de litres supplémentaires. Après les lourds combats au sein de la capitale, la nourriture commence aussi à se faire rare. Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a envoyé 600 tonnes de denrées alimentaires, dont de la farine, des pâtes ou encore de l’huile. D'autres livraisons par bateau sont prévues. La nourriture est livrée au Croissant Rouge Libyen pour être ensuite redistribuée à la population.
La situation des migrants africains est aussi très délicate. Répartis sur le territoire libyen, certains ont réussi à fuir le pays (voir la photo).
Des travailleurs égyptiens fuient la Libye
Mais il en reste des centaines, coincés dans des camps de fortune aux abords de Tripoli. A l'origine, ils fuyaient les combats dans leurs propres pays ou cherchaient à rejoindre l'Europe par bateau. Accusés à tort d'être des mercenaires à la solde de Kadhafi, ils sont désormais pris pour cible par la population et n'osent plus sortir des camps.
Selon Médecins sans Frontières (MSF), en Libye depuis le 25 mars, ces migrants bloqués dans la capitale vivent dans des conditions épouvantables. "Beaucoup souffrent d'infections respiratoires, de maladies de la peau et de troubles gastro-intestinaux, explique le Dr Paulo Reis, coordinateur médical de MSF dans un communiqué. Ces pathologies sont liées à leurs conditions de vie très précaires. La plupart des problèmes médicaux que nous avons traités sont liés au stress, notamment la difficulté de dormir la nuit en raison d'une peur extrême et constante."
La manne pétrolière indispensable
Plus que la présence d’humanitaires, la Libye a besoin de ses propres fonds pour relancer l’économie. Certains hôpitaux manquent de vaccins et de médicaments. Conjugué à la raréfaction de l'eau potable, la crainte d'épidémies est très forte. Le prix du lait a doublé tandis que celui de l'essence est multiplié par 20. Les raffineries, sources de la richesse du pays, sont complètement bloquées.
L’Union Européenne (UE) a débloqué 150 millions d’euros d’aide, selon le datablog du Guardian, qui cite les données de l'office d'Aide humanitaire de la Commission européenne (ECHO) en date du 14 août. Dans le détail, 140 millions ont été récupéré par huit pays, dont la France, pour financer des opérations de rapatriement d’Occidentaux et de migrants africains. Le reste a été utilisé pour l'achat de matériel.
Malgré la chute de Kadhafi, sur place, la situation est loin d'être pacifiée. "Pour que les ONG puissent intervenir, il faut déjà que leur sécurité soit assurée, explique Kader Abderrahim, chercheur à l’Iris et professeur associé à l’Université de CalifornieLes interventions étrangères sont généralement mal vues par la population. Si en plus elles sont accompagnées d’une intervention humanitaire… Il ne faut pas qu’il y ait de confusion des genres. Il est probablement trop tôt pour qu’elles interviennent".
L'ONU, de son côté, prépare avec ardeur l'après-Kadhafi, en collaboration avec le Conseil national de transition (CNT). Un plan en trois points est déjà prêt. Pour autant, tout n'est pas parfait entre les deux parties. Si le CNT est ouvert à la présence d'observateurs sur le sol libyen, il a proclamé son refus de voir une quelconque force militaire, onusienne ou autre, débarquer dans le pays, s'opposant ainsi au souhait de Ban Ki-Moon.

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